Essai
Les sociétés secrètes, des Rose-Croix aux Anonymous. XVIIe-XXIe siècle
De Pierre-Yves Beaurepaire
Éditions Tallandier
336 pages — 21,90 euros
Après un ouvrage publié chez le même éditeur en 2022, consacré aux Illuminati, Pierre-Yves Beaurepaire élargit ici son champ d’investigation, en s’intéressant cette fois aux sociétés secrètes, du XVIIe siècle à nos jours. Elles ne manquent pas, et ce livre nous réserve de belles surprises, avec ce mot qui revient souvent sous la plume de l’auteur : complotisme. Si les Illuminati sont encore bien présents dans cette somme, bien étudiés aussi, au regard des derniers travaux disponibles, et aussi des « révélations » livrées au quotidien par Internet, bien d’autres sociétés sont décryptées ici : Les Rose-Croix, les fraternités étudiantes américaines, la Propaganda Due (P2), l’Ordre du Phénix… jusqu’aux Anonymous. Les pages consacrées à la P2 et à la société secrète emblématique de l’Université de Yale, Skull and Bones, sont édifiantes.
Beaurepaire nous fait comprendre au fil des pages ce que ces sociétés « destinées à un public soit de niche, soit élargi disent de notre rapport aux maîtres du secret et de notre relation complexe au secret lui-même. » Ses sources sont multiples : Internet, livres, films, jeux vidéo, bandes dessinées… Il présente, décortique puis analyse. Il pénètre la fabrication des mythes, part des hypothèses mises en scène par certains, devenues ensuite des certitudes, c’est tellement confortable. Mais ni les unes ni les autres ne reposent sur quelque chose de concret. Les rapprochements, les amalgames sont de mise, sur fond de divulgation… de scénarios improbables et de fake news. L’auteur avec cet essai met à notre disposition des outils pour comprendre et raison garder. Oui, raison garder, alors que nous sommes tous fascinés par le secret au point parfois de céder à l’addiction. Noëlle Delomel
Essai
Olympe de Gouges. Une femme dans la Révolution
De Florence Lotterie et Élise Pavy-Guilbert
Éditions Flammarion/France TV
176 pages — 22 euros
S’il fallait résumer la vie et l’action d’Olympe de Gouges, née Marie Gouze en 1748, deux mots suffiraient : engagement passionné. Elle les a payés cash le 2 novembre 1793, condamnée à mort après un procès, disons… orienté, sans avocat en tout cas. Olympe relève ce fait, on lui rétorque qu’elle a bien « assez d’esprit pour se défendre seule ». Tout est dit. Le lendemain, elle est guillotinée.
Engagée, elle l’a été. Dans sa vie, par ses écrits aussi. Elle a publié sous son nom de nombreux textes… romans, pièces de théâtre, et bien sûr des écrits politiques sur des sujets très variés : justice sociale, éducation, respect de la liberté d’expression. Elle est notamment l’autrice en 1791 de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, où elle écrit dès le préambule : « Homme, qui t’a donné le souverain empire de dominer mon sexe ? » Elle s’engage aussi pour l’amélioration du sort des plus faibles, pour l’abolition de la traite, elle dénonce ceux qui veulent accaparer la Révolution. Ce livre, qui nous raconte l’histoire de cette femme qui se voulut libre, aujourd’hui encore méconnue, s’est comme l’écrivent les autrices, « mis dans les pas du récit télévisuel » qui a été diffusé il y a peu sur France 2.
La conclusion de l’ouvrage évoque la postérité d’Olympe de Gouges, elle mérite une lecture attentive : on la voit souvent dénigrée, et ce aujourd’hui encore. On note aussi que les deux réalisateurs du film, Julie Gayet et Mathieu Busson, nous offrent leurs souvenirs de cette aventure cinématographique. Un beau texte, lui aussi, agrémenté de plusieurs photos prises pendant le tournage. Noëlle Delomel
Essai
Sociétés secrètes & gastronomie
De Bruno Fuligni
Éditions Dervy
119 pages — 16 euros
Cet essai nous fait découvrir nombre de sociétés plus ou moins secrètes selon les périodes qui, dès le XVIIe siècle, ont cultivé les plaisirs de la table, entre nourriture et boissons diverses, sans oublier une notion fondamentale, celle de la liberté. Si la France est surtout mise en avant, l’auteur nous offre quelques incursions en Belgique et en Grande-Bretagne.
Les noms de ces sociétés sont déjà un régal… la Confrérie des Sacavins, les Garçons de Bonne Humeur, l’Ordre du Tonneau, ou celui des Francs-Buveurs. Nombre de ces sociétés plus ou moins secrètes sont placées sous le signe de Bacchus. D’autres y ajoutent une dimension culinaire, ainsi l’étonnante Société Pantechnique et Palingénésique des Agathopèdes dont les dirigeants portaient des rubans ornés de coquilles d’huitres ! Ces Agathopèdes s’étaient dotés de leur propre calendrier : crépôse, truffôse, huîtrimaire… Toutes ces sociétés alliaient camaraderie et bonne chère et la truculence était de mise. Nombre d’entre elles ont été surveillées par la police de leur époque, car, revendiquant la liberté, elles faisaient parfois la nique au pouvoir, quel qu’il soit. Elles se dotaient de statuts très précis, de rituels, les membres étaient cooptés, des épreuves étaient prévues pour les postulants, et les travaux de table étaient très organisés. Nombre d’entre elles sont nées en même temps que la franc-maçonnerie, d’autres la caricaturaient. Cette tradition se prolonge aujourd’hui à travers certains clubs très fermés présentés par l’auteur, dont la Confrérie des Chevaliers du Malt et de la Musique, qui entend promouvoir la connaissance et la découverte de la musique et du whisky. Le « vieil idéal humaniste, combinant plaisir et mesure, nature et culture, pensée libre et sociabilité », pour reprendre les termes de Fuligni, a encore de beaux jours devant lui… À vos fourchettes et à vos verres, sans abus bien sûr ! Noëlle Delomel
Et aussi…
De la croix à l’échelle — Du 19e au 29e degré
De Jacques Branchut et Alain Breuillin
Éditions Numérilivre
Les Constitutions de Roberts (1722)
De Jules Mérias
Symbolon éditions
Epistolae Latomorum
N° 70, printemps 2025
Revue de La Grande Loge Traditionnelle et Symbolique Opéra
Conform éditions
Le guide maçonnique du maître secret
De Pascal Dumesnil
MdV Éditeur